> [!info]
Auteur : [[Thomas Le Roux]] & [[François Jarrige]]
[Zotero](zotero://select/library/items/54ZBJM62)
[attachment](<file:///C:/Users/Bamwempan/Zotero/storage/PXNK26NJ/Del%C3%A9age%20et%20al.%20-%202020%20-%20Lutter%20contre%20le%20gaspillage,%20r%C3%A9forme%20ou%20r%C3%A9volution.pdf>)
Source: https://www.cairn.info/revue-ecologie-et-politique-2020-1-page-31.htm
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# Annotations
> [!approfondir] Page 31
> Elle néglige en particulier combien l’essor des pratiques et imaginaires consuméristes a reposé sur de nouvelles circulations massives de matières et de produits, dont beaucoup finissent en déchets ultimes.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=2&annotation=7B8KEN7Z)
> ^7B8KEN7ZaPXNK26NJp2
> [!approfondir] Page 31
> La question pose néanmoins toute une série de problèmes aux historiens, tant les pratiques en aval de la consommation sont difficiles à saisir dans les sources : la récupération, la réparation, le bricolage ou les actions de réutilisation, qui tendent à limiter le gaspillage, sont largement invisibles.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=2&annotation=PG2NP988)
> ^PG2NP988aPXNK26NJp2
> [!information] Page 32
> Au xixe siècle, le «déchet » désigne avant tout la diminution et le discrédit d’une chose ou d’un phénomène. Dans l’ordre de la production, c’est plutôt le mot « résidu » qui est employé[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=3&annotation=U6CR3Z7F)
> ^U6CR3Z7FaPXNK26NJp3
> [!information] Page 32
> Le déchet et les matières non utilisées renvoient à la notion de gaspillage, dont on retrouve la trace dès le xvie siècle dans le monde rural. Issu du vieux français « gaspail, gaspailler », le gaspillage désigne alors un déchet de paille. Au xviiie siècle, il s’étend à l’idée de perte d’une unité mesurable, tel le temps, l’argent, le talent.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=3&annotation=JAGAVWR8)
> ^JAGAVWR8aPXNK26NJp3
> [!information] Page 32
> son emploi apparaît de plus en plus fréquent au cours des deux derniers siècles, avec un premier pic lors de la première guerre mondiale, puis un second, plus important, durant les années 1970, lorsque l’appel à l’économie des ressources et à la sobriété pousse à lutter contre toutes les formes de gaspillage.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=3&annotation=HCGAGPF3)
> ^HCGAGPF3aPXNK26NJp3
> [!information] Page 33
> Les Anglais semblent gaspiller davantage du fait de l’abondance de la ressource, là où en France des stratégies de valorisation des houilles et des efforts de classifications sont conçus pour rationaliser et économiser cette ressource dont le pays manque11.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=4&annotation=GTUKHCVM)
> ^GTUKHCVMaPXNK26NJp4
> [!approfondir] Page 33
> Si les sociétés rurales sont enclines à lutter contre le gaspillage de matières, les sociétés urbaines bourgeoises le deviennent moins : pour elles, le gaspillage relève d’abord d’une perte d’argent ou de temps, il est un dysfonctionnement de la rationalité économique[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=4&annotation=4KENUNTU)
> ^4KENUNTUaPXNK26NJp4
> [!information] Page 34
> Par exemple, les pollutions peuvent être perçues comme signe de gaspillage, en particulier la fumée, qui témoigne d’une mauvaise combustion, discours que les ingénieurs du secteur privé sont prêts à entendre dans un contexte économique difficile.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=5&annotation=YPU3DKNF)
> ^YPU3DKNFaPXNK26NJp5
> [!approfondir] Page 34
> Des associations de lutte contre les fumées charbonneuses perçues comme un absurde gaspillage se constituent en Grande-Bretagne dès le milieu du xixe siècle ; le médecin et physicien Neil Arnott estime, quant à lui, en 1855 que le gaspillage, par la fumée, est un crime contre les générations futures14[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=5&annotation=B2MS29TK)
> ^B2MS29TKaPXNK26NJp5
> [!information] Page 34
> La recherche de l’élimination du « gâchis » (waste) est au cœur du mouvement taylorien du début du xxe siècle.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=5&annotation=E2SSZVM5)
> ^E2SSZVM5aPXNK26NJp5
> [!approfondir] Page 34
> Les sousproduits de boucheries, les coquilles d’huîtres, les chiffons de laine ou encore les vieilles chaussures, tous ces produits du quotidien sont réutilisés d’une façon ou d’une autre : les chiffons servent à fabriquer le papier, les os à la fabrication d’objets ou d’ornementation.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=5&annotation=578BICPJ)
> ^578BICPJaPXNK26NJp5
> [!accord] Page 35
> Les misérables, Victor Hugo notait que « tout l’engrais humain et animal que le monde perd, rendu à la terre au lieu d’être jeté à l’eau, suffirait à nourrir le monde16 ».[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=6&annotation=LRI7R8G7)
> ^LRI7R8G7aPXNK26NJp6
> [!information] Page 35
> Dans une autre perspective, le philosophe républicain Pierre Leroux propose une économie politique du déchet à travers son modèle du circulus formulé dès les années 1830.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=6&annotation=BCX57GYU)
> ^BCX57GYUaPXNK26NJp6
> [!information] Page 35
> Après son exil en 1851, Leroux expérimente sa théorie et utilise ses propres excréments comme fertilisants, puis il cherche à convaincre les autorités d’adopter ce système, faisant des déchets un puissant élément de régénération sociale[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=6&annotation=QU8T8874)
> ^QU8T8874aPXNK26NJp6
> [!approfondir] Page 35
> Les principaux économistes, industriels ou agronomes du temps s’y intéressent d’ailleurs, à l’image de [[Karl Marx]] et Justus von Liebig dont les interrogations sur la fertilité des sols et les échanges inégaux entre mondes ruraux et urbains lancent un débat fécond.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=6&annotation=5DJUIKC7)
> ^5DJUIKC7aPXNK26NJp6
> [!information] Page 35
> Dans le livre III du Capital, [[Karl Marx|Marx]] distingue deux types de résidus : les résidus de la consommation dont l’« utilisation donne lieu, dans la société capitaliste, à un gaspillage considérable19 », et les résidus de la production, qui peuvent faire l’objet d’un recyclage important, surtout si la production est importante et la chimie développée.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=6&annotation=8H4CTEE4)
> ^8H4CTEE4aPXNK26NJp6
> [!information] Page 36
> Cette quête incessante de matière touche aussi la consommation, les pratiques commerciales d’occasion étant très répandues au xixe siècle. Avec les fripiers dominent des logiques de réutilisation des vêtements et un important commerce d’occasion, conjoint à des pratiques de réparation 22.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=7&annotation=WU2K6GI2)
> ^WU2K6GI2aPXNK26NJp7
> [!approfondir] Page 36
> Dans ses budgets, Le Play tient le compte de ce type de pratiques. Au milieu du xixe siècle, l’ouvrier typographe Badier évalue par exemple la durée de vie de ses vêtements – dix ans pour une redingote ; selon une répartition sexuée des tâches, sa femme rapièce et fait durer les habits de la famille alors qu’il se charge durant les veillées de réparer le mobilier23.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=7&annotation=FMFSGKV4)
> ^FMFSGKV4aPXNK26NJp7
> [!information] Page 36
> D’une part, les flux de matières entre la ville et la campagne sont rompus car les terres sont progressivement amendées et fertilisées, non plus par les déchets urbains, mais par des matières fossiles importées (guano, nitrate de soude, phosphates) ou par les nouveaux engrais chimiques, comme les superphosphates (années 1840) dont la gamme ne cesse de s’étendre après 1860.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=7&annotation=GUDMZEXM)
> ^GUDMZEXMaPXNK26NJp7
> [!approfondir] Page 37
> De nouvelles formes de consommation ostentatoires sont par ailleurs stimulées par la première mondialisation et le libre-échange qui poussent à une baisse des prix. Ces éléments aboutissent à « l’invention des déchets » qui s’accumulent de façon inédite dans les espaces urbains et qui commencent à être pris en charge, à des coûts élevés, par les autorités locales.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=8&annotation=AB62TBWN)
> ^AB62TBWNaPXNK26NJp8
> [!approfondir] Page 37
> Le fumier, engrais par excellence pour les paysans, ne devient un déchet qu’à partir du moment où les engrais chimiques et l’apport de substances minérales prélevées ailleurs se développent à la fin du xixe siècle. Le discours des chimistes et des agronomes, adeptes de cette modernisation, accompagne cette évolution.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=8&annotation=VXZ2U3NB)
> ^VXZ2U3NBaPXNK26NJp8
> [!information] Page 37
> Le paradoxe est qu’au nom de l’optimisation des matières nutritives pour les sols, le cycle des matières est rompu et les matières de vidanges sont de plus en plus déversées dans les égouts pour finir dans les rivières, un processus renforcé après 1880 avec la généralisation du tout-à-l’égout et des chasses d’eau dans les villes.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=8&annotation=AA5WJNHQ)
> ^AA5WJNHQaPXNK26NJp8
> [!approfondir] Page 38
> Le recyclage apparaît comme un instrument pour réinscrire la question des déchets dans la rationalité économique des fabricants en quête de profits.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=9&annotation=4L3DAWAU)
> ^4L3DAWAUaPXNK26NJp9
> [!accord] Page 38
> Dans une conférence donnée en 1894 dans un quartier populaire de Manchester, il dénonce avec force le gaspillage incessant de l’industrie moderne : « Mes amis, un très grand nombre de gens sont employés à produire de pures et simples nuisances comme le fil de fer barbelé, l’artillerie lourde, les enseignes et les panneaux publicitaires disposés le long des voies ferrées, qui défigurent les champs et les prés, etc. Hormis ce genre de nuisances, combien de travailleurs fabriquent des marchandises dont la seule utilité est de permettre aux gens riches de “dépenser leur argent”, comme on dit. [...] En résumé, de quelque manière qu’on la considère, notre industrie n’est que gaspillage32. »[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=9&annotation=ELKR8NBU)
> ^ELKR8NBUaPXNK26NJp9
> [!information] Page 39
> Les deux guerres mondiales sont des périodes de pénuries qui marquent le retour d’une lutte contre le gaspillage perçu comme antipatriotique36.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=10&annotation=KG89ETXI)
> ^KG89ETXIaPXNK26NJp10
> [!approfondir] Page 39
> En 1916, le ministre français de la Guerre ordonne par exemple que soit « réprimé sévèrement tout gaspillage d’essence », mais aussi que soit limité « l’emploi des automobiles pour tous transports ou déplacements qui peuvent être effectués par d’autres moyens37 »[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=10&annotation=DB5WC6VZ)
> ^DB5WC6VZaPXNK26NJp10
> [!approfondir] Page 39
> Durant la seconde guerre mondiale, le gouvernement américain encourage l’usage du vélo, tandis que celui de Grande-Bretagne promeut le recyclage38.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=10&annotation=IB3WCQ7Z)
> ^IB3WCQ7ZaPXNK26NJp10
> [!information] Page 39
> En 1932, une grande « exposition du gaspillage» est même organisée à Paris, largement relayée par la presse de province, où « plusieurs grandes administrations ont déjà fait chez elles des expositions de gaspillage » ; le journaliste recommande alors «une exposition de gaspillage spécialement pour les écoliers et les écolières40 ».[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=10&annotation=3HWIS867)
> ^3HWIS867aPXNK26NJp10
> [!information] Page 40
> Dans les filatures, par exemple, les chrysalides, c’est-à-dire 79 % environ du poids du cocon frais, sont un résidu des opérations de dévidage, qui peut être destiné à l’alimentation animale ou à la fertilisation.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=11&annotation=PSA28JH3)
> ^PSA28JH3aPXNK26NJp11
> [!accord] Page 40
> Ces quelques exemples de gestion contrainte de la pénurie ne doivent toutefois pas masquer combien, à un niveau plus macroéconomique, les nations belligérantes engagent une mobilisation totale de leur appareil productif qui prépare un accroissement considérable du gaspillage une fois la paix revenue.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=11&annotation=PZZCJJY5)
> ^PZZCJJY5aPXNK26NJp11
> [!accord] Page 40
> Les quantités de déchets, quelles que soient les substances envisagées, augmentent fortement sur le plan quantitatif, alors que d’un point de vue plus qualitatif ils sont de moins en moins biodégradables, de plus en plus complexes et toxiques.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=11&annotation=UBASG9CA)
> ^UBASG9CAaPXNK26NJp11
> [!accord] Page 41
> Les après-guerres font rapidement disparaître le souci d’économie et le gaspillage devient alors une manifestation de liberté alors que le recyclage et la sobriété sont renvoyés du côté de l’avarice, des mauvais souvenirs de la guerre et de l’occupation, ce qui explique le formidable gaspillage associé à la croissance économique d’après 1945.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=12&annotation=MLX6U9D4)
> ^MLX6U9D4aPXNK26NJp12
> [!information] Page 41
> En France, recycler apparaît en 1959 et recyclage en 1960. L’emploi se développe dans les deux langues surtout dans les années 1970, précisément à une époque où la quantité de déchets suit une trajectoire exponentielle à l’échelle de la planète.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=12&annotation=NC5XEVAA)
> ^NC5XEVAAaPXNK26NJp12
> [!information] Page 41
> À contre-courant des tentatives pour lutter contre le gaspillage durant la grande crise des années 1930, de nouvelles pratiques gaspilleuses sont inaugurées ; ces dernières sont en effet censées relancer la croissance. C’est ainsi durant l’entre-deux-guerres qu’est théorisée aux États-Unis la notion d’obsolescence programmée.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=12&annotation=K9HKGKGS)
> ^K9HKGKGSaPXNK26NJp12
> [!approfondir] Page 41
> En 1932, Bernard London l’évoque pour la première fois comme une stratégie commerciale susceptible de répondre à la crise et à la grande dépression, pour stimuler la consommation globale, soutenir l’industrie et permettre de renouer avec la croissance 43[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=12&annotation=9WDM9GXB)
> ^9WDM9GXBaPXNK26NJp12
> [!information] Page 41
> Dans les années 1920, face à la chute de leurs ventes, les principaux fabricants d’ampoules (le fameux « Cartel Phoebus ») décident de mettre en place une entente commerciale afin de limiter la durée de vie de leurs produits et contraindre le consommateur à les renouveler et donc les acheter plus souvent.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=12&annotation=XYPKZ72L)
> ^XYPKZ72LaPXNK26NJp12
> [!approfondir] Page 42
> Elle finance une grande campagne publicitaire dans la presse, où elle vante les mérites de sa nouvelle invention, si pratique, s’ouvrant en un tour de main, conservant le goût et la fraîcheur, et qui, surtout, permet de « boire directement sans avoir de bouteilles vides à ramener ».[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=13&annotation=CERRE2ZE)
> ^CERRE2ZEaPXNK26NJp13
> [!information] Page 42
> alors qu’en 1947 100 % des sodas et 58 % des bières sont vendus dans des bouteilles réutilisables, en 1971 cette part n’était plus respectivement que de 25 %.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=13&annotation=DNE4ZEJ3)
> ^DNE4ZEJ3aPXNK26NJp13
> [!accord] Page 42
> Ce faisant, on promeut le recyclage des matières jetées, car cela permet de créer de nouvelles filières industrielles et donc davantage de croissance[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=13&annotation=CCQLGDJX)
> ^CCQLGDJXaPXNK26NJp13
> [!approfondir] Page 42
> Publicitaires, commerciaux et designers deviennent des prescripteurs de goût et de désir, et accompagnent la société de consommation en remodelant sans cesse la subjectivité des individus au service de la construction des marchés et de l’accroissement des profits[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=13&annotation=4MXU8GYW)
> ^4MXU8GYWaPXNK26NJp13
> [!approfondir] Page 42
> Durant la première décennie de l’après-guerre, le gaspillage n’est plus condamné mais devient au contraire une pratique socialement valorisée, identifiée à la croissance du confort et du bien-être, signe d’abondance.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=13&annotation=PALZBRD4)
> ^PALZBRD4aPXNK26NJp13
> [!information] Page 43
> le taux d’équipement en réfrigérateurs en France passe de 7,5 % en 1949 à 88,5 % en 1974 ; la proportion des WC intérieurs augmente quant à elle de 28 % en 1954 à 73,8 % en 1975, etc.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=14&annotation=R2D9KEUV)
> ^R2D9KEUVaPXNK26NJp14
> [!accord] Page 43
> Au lieu de dénoncer les pratiques de gaspillage des classes dominantes, il s’agit de généraliser la surconsommation des élites à l’ensemble de la population, même si les pratiques de consommation continuent évidemment de différer beaucoup selon les pays, les groupes et les catégories sociales, mais aussi les idéologies politiques ou religieuses48.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=14&annotation=TNRTGKYM)
> ^TNRTGKYMaPXNK26NJp14
> [!information] Page 43
> Dès 1925, l’économiste américain Stuart Chase décrit ce phénomène dans son livre The Tragedy of Waste, et dix ans plus tard l’historien Lewis Mumford en dénonce les mécanismes49[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=14&annotation=59UQNRBL)
> ^59UQNRBLaPXNK26NJp14
> [!accord] Page 43
> « Les machines automatiques ne sont avantageuses qu’autant que l’on s’en sert pour produire en série et en quantités massives ; leur fonctionnement est donc lié au désordre et au gaspillage qu’entraîne une centralisation économique exagérée ; d’autre part elles créent la tentation de produire beaucoup plus qu’il n’est nécessaire pour satisfaire les besoins réels, ce qui amène à dépenser sans profit des trésors de force humaine et de matières premières50. »[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=14&annotation=KJUGRBB2)
> ^KJUGRBB2aPXNK26NJp14
> [!information] Page 44
> Dans son livre L’utopie ou la mort ! publié en 1973 et vendu à 150 000 exemplaires, il énonce son nouveau credo : critique radicale de la « société du gaspillage», mise en cause violente des « pays riches égoïstes », de l’automobile « symbole de nos aberrations », dénonciation des « industries mécanisées » qui ruinent les artisanats locaux et bouleversent les environnements.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=15&annotation=PERSPF72)
> ^PERSPF72aPXNK26NJp15
> [!approfondir] Page 44
> Pourtant, les quantités de matières consommées, transformées et rejetées dans les milieux ne cessent de s’accroître depuis et le modèle du gaspillage d’abord limité aux nations industrialisées du Nord s’est plutôt universalisé à l’échelle du globe avec la nouvelle phase de mondialisation néolibérale et l’essor des nouvelles trajectoires informatiques et numériques[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=15&annotation=GDLMAJ6H)
> ^GDLMAJ6HaPXNK26NJp15
> [!accord] Page 45
> Mais qu’en est-il de la réalité derrière les apparences et les discours ? Nous sommes rentrés dans une société qui refuse officiellement le gaspillage, alors même que celui-ci reste massif, qu’il est plus que jamais au cœur des dynamiques de croissance et des modes de vie individuels : un constat qu’un retour vers l’invention du gaspillage permet d’autant mieux de mettre en lumière.[](zotero://open-pdf/library/items/PXNK26NJ?page=16&annotation=N4JWY8WS)
> ^N4JWY8WSaPXNK26NJp16