Auteur : [[Félix Guattari]], [[Emmanuel Videcoq]], [[J.-Y. Sparel]]
Zotero : [Local library](zotero://select/items/1_7P9AXMR8)
URL : [https://www.persee.fr/doc/chime_0986-6035_1996_num_28_1_2073](https://www.persee.fr/doc/chime_0986-6035_1996_num_28_1_2073)
Connexion :
---
# Annotations
(30/01/2023 à 00:14:21)
> [!accord]
> « D’abord, c’est une science, la science des écosystèmes de toute nature. Elle n’a pas des contours bien délimités car elle prend en compte aussi bien des écosystèmes sociaux, urbains, familiaux que ceux de la biosphère. » (Guattari et al., 1996, p. 19)
> [!accord]
> « Est ainsi née l’idée d’«écosophie » articulant les trois écologies : environnementale, sociale et mentale. » (Guattari et al., 1996, p. 19)
> [!approfondir]
> « écosophique comme articulé selon quatre dimensions : celles de flux, de machine, de valeur et de territoire existentiel. » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!accord]
> « Celle de flux est évidente ; puisque justement dans les écosystèmes il y a toujours articulation de flux les uns par rapport aux autres, notamment de flux hétérogènes. » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!approfondir]
> « Celle de machine est là pour donner une dimension de rétroaction cybernétique, d’autopoïétique, c’est-à-dire d’auto-affirmation ontologique, sans tomber dans le mythe animiste ou vitaliste, comme par exemple celui de l’hypothèse Gaïa de J. Lovelock et L. Margulis » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!information]
> « d’autopoïèse » (Guattari et al., 1996, p. 20) 3:23 Rhizom_a_tique: auto-poièse = auto-organisation
Autofabrication
> [!accord]
> « Cet objet écosophique est non seulement autopoïétique, mais aussi porteur de valeurs, de registres et de perspec¬ tives de valorisation. Il est important pour repenser la problématique de la valeur, y compris la valeur économique et pour articuler la valeur capitalistique, la valeur d’échange au sens marxiste, avec les autres systèmes de valorisation sécrétés par les systèmes autopoïétiques : systèmes sociaux, groupes, individus, sensibilités individuelles, artistiques, religieuses ; pour les articuler entre eux, sans que la valeur économique les surplombe, et les écrase tous. » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!approfondir]
> « Dans son système de valeurs, l’objet écosophique a une naissance et une fin ; il est en rapport avec une altérité machinique, un phylum machiniste » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!accord]
> « n effet, n’importe quel système a à la fois un antécédent et un avenir systémique. Sans portée universelle, il est lié dans des processus d’historicité. » (Guattari et al., 1996, p. 20)
> [!accord]
> « Parce qu’il y a la coupure de l’individuation écosystémique comme finitude, il y ajuste¬ ment possibilité que les systèmes s’enchaînent les uns par rapport aux autres et développent un grand phylum évolutif. » (Guattari et al., 1996, p. 21)
> [!approfondir]
> « L’objet écosystémique est un objet de métamodélisation en ce sens qu’il a prétention d’englober les différentes modéli¬ sations qui nous sont proposées : de type marxiste, de type animiste, de type esthétique. » (Guattari et al., 1996, p. 21)
> [!accord]
> « On peut ainsi voir comment s’articulent les systèmes de valeurs, plutôt que de les opposer de façon manichéiste les uns aux autres. » (Guattari et al., 1996, p. 21)
> [!accord]
> « Elle appelle aussi l’incarnation d’un système de modélisation, pour soutenir ces univers de valeurs, c’est-à-dire des pratiques sociales, de terrain, des pratiques analytiques quand il s’agit de production de subjectivité » (Guattari et al., 1996, p. 21)
> [!accord]
> « Il vaut mieux concevoir des processus d’affirmation de valeurs qui respectent leur hétérogénéité et leur singularité. Je refuse les jugements transcendants. » (Guattari et al., 1996, p. 22)
> [!information]
> « eux exemples... Au sein des écologistes, la mouvance de gauche, rejette ceux qu’on appelle les « Khmers verts ». Mais ceux-ci représentent quelque chose d’absolument authentique dans la subjectivité écologiste et dans les rap¬ ports de force. C’est aussi parce qu’ils existent que 15 à 20 % de l’électorat se disent prêts à voter écologiste. » (Guattari et al., 1996, p. 22)
> [!accord]
> « Même chose avec le lepénisme : comprenons pourquoi des masses importantes de la population, notamment ouvrière, basculent dans cette idéologie. Regardons-la de l’intérieur sans chosifier les valeurs en disant : c’est réac, fasciste, d’extrême droite, etc. » (Guattari et al., 1996, p. 22)
> [!accord]
> « Sinon on perd toute possibilité d’articulation pragmatique pour influencer, pour « rhizomatiser » cette composante. » (Guattari et al., 1996, p. 22)
> [!accord]
> « C’est ainsi qu’on les réifie, qu’on veut les rendre fous. Pour moi il ne s’agit pas d’entrer en polémique par exemple avec un malade délirant. Il peut avoir notamment des crises psychotiques s’accompagnant parfois de délires racistes, de haine de la différence, de l’étrangeté. Il faut chercher à comprendre comment cet agencement subjectif aboutit à une modélisation de la réalité complètement diffé¬ rente de la mienne et entrer dans des rapports de production sémiotique pour qu’il y ait un sortie évolutive, processuelle à ce type d’impasse. » (Guattari et al., 1996, p. 22)
> [!accord]
> « l s’agit de concevoir des pratiques d’intervention sociale, y compris politiques, gouvernementales, qui soient cohé¬ rentes avec des pratiques sociales de terrain, avec des pratiques dissensuelles, culturelles, analytiques, individuelles et de groupe, et esthétiques et de développer une politique et des moyens, des dispositifs, qui permettent ce caractère dissensuel. » (Guattari et al., 1996, p. 23)
> [!approfondir]
> « Je pense qu’il faut complètement dépasser l’essentiel de nos positions traditionnelles entre mouvements, partis ou associations et trouver une nouvelle forme permettant de superposer, d’établir un rapport poly¬ phonique entre les différents objectifs pragmatiques. » (Guattari et al., 1996, p. 23)
> [!accord]
> « donc que les individus délégués, ou se vouant à ce type de corvée poli¬ tique, soient acceptés pour ce que l’objectif vaut, c’est-à-dire important, mais pas fondamental. Qu’ils soient des leaders politiques, mais qu’ils ne deviennent pas des leaders affectifs, des leaders imaginaires. » (Guattari et al., 1996, p. 23)
> [!accord]
> « Ceci veut concrètement dire que dans le mouvement écolo¬ giste il apparaît tout aussi important, équivalent et légitime de s’occuper de groupes de quartier, de vie, etc. que de « magouiller » dans des rapports de force politiques et organisationnels. Il y a là toute une écologie sociale du mouvement lui-même qui doit trouver sa régulation. » (Guattari et al., 1996, p. 23)
> [!accord]
> « Deuxièmement, c’est justement à la condition qu’il y ait invention d’une autre façon de militer, de faire de la poli¬ tique, d’articuler la préoccupation la plus immédiate, la plus quotidienne aussi bien au niveau de l’environnement qu’au niveau de la vie sociale, de ce qui se passe dans le quartier, dans les hôpitaux, etc. qu’il pourra y avoir conso¬ lidation de cette opinion. » (Guattari et al., 1996, p. 24)
> [!approfondir]
> « Si on prétend changer seulement sectoriellement, constituer une petite force d’appoint, un petit lobby de pression sur l’environnement, alors moi je pense que c’est perdu d’avance ; parce que ça marchera très bien : l’industrie ne demande pas mieux que d’utiliser le mouvement écologiste comme elle a utilisé le mouvement syndical pour sa propre structuration du champ social. » (Guattari et al., 1996, p. 24)
> [!accord]
> « Car la machine est toujours en dialogue avec une altérité : dans son environnement technologique, humain, mais également par ses liens philogénétiques avec les machines l’ayant pré¬ cédée et celles à venir. Apparaît là une nouvelle forme d’altérité : celle située dans le temps. » (Guattari et al., 1996, p. 25)
> [!approfondir]
> « En plus de l’altérité, la machine établit aussi la finitude : elle naît, se détraque, se casse, meurt. Pour cette raison, on avait élargi le concept de machine, au-delà des machines techniques, aux machines biologiques, sociales, urbaines, aux mégamachines, linguistiques, théoriques et même aux machines désirantes. Ce concept envisage donc la possibili¬ té pour la machine de s’abolir elle-même. » (Guattari et al., 1996, p. 25) 3:48 Rhizom_a_tique: C'est pas du "mécanisme" 3:48 Rhizom_a_tique: C'est la machine au-delà du "mécanisme"
> [!approfondir]
> « L’existence d’un collapsus entre la plus grande complexité et son abolition est possible. Je l’appelle la chaosmose : on peut être dans un rapport hautement différencié au monde, à l’environne¬ ment, etc., mais aussi ne pas être, disparaître, se dissoudre dans le chaos. » (Guattari et al., 1996, p. 25)
> [!approfondir]
> « Avec la symbiose entre la machine, l’outil et le champ social et humain et l’apparition de machines conceptuelles, linguistiques, diagrammatiques en articulation entre elles, s’opère un décentrement de l’essence du machinisme de sa partie visible vers sa partie incorporelle. » (Guattari et al., 1996, p. 26)
> [!information]
> « Il sort des paradigmes préexistants. Il entraîne une vitalité, une prolifération, une incarnation existentielle partielle que j’appelle territoires existentiels. L’intuition de ce concept de machine vise à échapper à la logique d’objet discursif, de flux manifeste, pour intégrer des entités non discursives, incorporelles, contingentes, comme celle de l’existence. » (Guattari et al., 1996, p. 27)
> [!approfondir]
> « Il y a autant de références de « grand autre » qu’il y a de mutations des univers de référence. Ainsi la musique poly¬ phonique est une création sui generis, sans aucun fonde¬ ment, sans aucun grund, quelles que soient les filiations auxquelles on la rapporte : naissance de la pensée mathé¬ matique ou philosophique. Je ne vois pas de préalable à cette créativité absolue, pas de chaînes signifiantes ou de primat de l’être. Il y a hétérogenèse, ce qui constitue un garant de l’activité humaine. » (Guattari et al., 1996, p. 27)
> [!approfondir]
> « L’histoire est de toutes façons une narration : épique, à connotation religieuse, marxiste, machinique, etc. Mais elles ont de la valeur, car ainsi on fait prendre consistance à la durée. Mon affirmation n’est pas plus scientifique que d’autres. Mais la différence avec l’explica¬ tion par l’universalité des rapports de production, vis-à-vis des rapports sociaux et culturels, réside en ce que le primat de l’explication machinique contourne radicalement toute idée de rapport entre infrastructure et superstructure. » (Guattari et al., 1996, p. 27)
> [!approfondir]
> « Par exemple, l’apparition des armes de fer démasqua des empires asiatiques existant depuis des millénaires. Pourtant ce put être tout autant une mutation partant des registres pour comptabiliser les machines de guerre, d’organiser les militaires, donc de l’ordre de l’écri¬ ture. Ça pourrait être aussi des mutations juridiques, dans un rapport de production (unité monétaire), dans la science, dans les transports (découvertes maritimes), etc. Une cau¬ salité obligée ne s’impose donc pas. » (Guattari et al., 1996, p. 28)
> [!approfondir]
> « Il faut au contraire rechercher comment se contaminent, s’influencent, se causalisent les différentes mutations machiniques ; comment elles créent des foyers de subjectivation partielle, une plus-value créatrice, une affirmation autopoïétique ; comment elles prennent le contrôle. » (Guattari et al., 1996, p. 28)
> [!approfondir]
> « Ce déplacement n’est pas purement économique, mais culturel, socio-politique, religieux, etc. Mais ça tient. C’est chaque fois l’histoire à l’état naissant, une cristallisation, une singularité. » (Guattari et al., 1996, p. 28)
> [!accord]
> « J’en vois deux parmi d’autres à signaler : le monde de la philosophie, qui d’une certaine façon forge ses objets absolument dans un rapport de vitesse infinie, de rupture infinie avec les catégories mondaines. Il se situe d’emblée dans une créativité de concepts qui travaillent à l’impuis¬ sance de l’infini. » (Guattari et al., 1996, p. 28)
> [!accord]
> « Et puis il y a le registre du monde esthétique qui, par contre, à partir d’une matière sensible, reproduit, restitue de la philosophie, des champs de découverte infinie. Il y a là tout un détour par le travail de la matière. » (Guattari et al., 1996, p. 28)
> [!information]
> « Pour moi, l’idée de mécanosphère suppose qu’il n’est pas impossible que naissent des dispositifs permettant d’expéri¬ menter cette jonction ; sans faire de la science, de l’art ou de la philosophie avec le social, mais en produisant des systèmes de valorisation multiples, hétérogènes, donnant le goût de la singularité, de la finitude, de l’être-là. » (Guattari et al., 1996, p. 29)
> [!accord]
> « En dehors, évidemment, des mythes rédempteurs, des fonctions poli¬ tiques de représentations aliénantes ! Il faut sortir de ce caractère de généralité abusive caractérisant la sphère médiatique, poursuivant les signes de valeurs de progrès qui finalement ne renvoient sur rien et n’accrochent pas le désir au champ social. » (Guattari et al., 1996, p. 29)
> [!approfondir]
> « Il y aurait là tout un décentrement ouvrant une pratique que j’ai appelé écosophique, une dis¬ cipline qui aurait à voir avec la politique, l’écologie, l’art, la science, etc., et qui serait quand même une pratique spé¬ cifique, une sorte de sagesse non contemplative. » (Guattari et al., 1996, p. 29)
> [!accord]
> « C’est un leurre tout-puissant. Le « marché » n’existe pas. Par contre existent toutes sortes de marchés. Exemples : celui de l’armement tenu par les puis¬ sances étatiques, les marchés régionaux, locaux, mais aussi les marchés parallèles de la drogue, de la mafia, ou encore le marché de l’art. A un niveau micro-sociologique existent les marchés domestiques, ceux du troc dans les pays sous-développés. . . » (Guattari et al., 1996, p. 30)
> [!accord]
> « Certains sont minorés, d’autres surestimés. Il n’y a donc pas de catégorie unique, transcendante, de marché mondial. » (Guattari et al., 1996, p. 30)
> [!accord]
> « Il y a des systèmes de valorisation posés comme territoires existentiels d’un certain nombre de formations, d’agencements de pouvoir. Ainsi en rapport avec le marché des pétrodollars, les USA ont monté une action ponctuelle, géopolitique, un coup de force, avec la guerre du Golfe. » (Guattari et al., 1996, p. 30)
> [!approfondir]
> « On peut, dans une perspective postmodemiste, accepter les formations de pouvoirs actuelles et dire que toutes celles qui existent sur le marché sont nécessaires et inévitables. On peut au contraire avoir une perspective axiologique et concevoir les formations de pouvoir soit pour les dissoudre, comme le marché du pouvoir phallocratique, soit pour créer un marché de pouvoir différent, par exemple pour l’art, en contrecarrant les marchands de tableaux, les musées, enfin tout ce qui gère l’art sur le marché mondial... » (Guattari et al., 1996, p. 30)
> [!approfondir]
> « Pourtant on peut imaginer un multicentrage, une disposition rhizomatique des formations de pouvoir, la régulation s’effectuant en termes de logique chaotique à travers des attracteurs déterminant des zones de pouvoir beaucoup plus déterritorialisées que celles de lobbies. » (Guattari et al., 1996, p. 31)
> [!accord]
> « De nouvelles entités subjectives transnationales, transeth¬ niques, transculturelles, etc., apparaissent. A contrario, les marchés de pouvoir étatiques mondiaux se maintiennent et tout cela ne sera pas balayé le jour du grand soir. . . » (Guattari et al., 1996, p. 31)
> [!accord]
> « C’est vrai que l’équivalent monétaire joue un rôle d’objet fascinant. Il pointe la ligne de déterritorialisation la plus intense. C’est une involution de la subjectivité dans un objet de désir, obsessif qui dissout les autres modes de valorisation. C’est une arme de toute-puissance, la plus abstraite. » (Guattari et al., 1996, p. 31)
> [!approfondir]
> « Pour moi, la valeur, c’est une polarisation au sein d’un champ de désir, d’un champ de pouvoir, d’un territoire existentiel qui peut prendre une dimension tout à fait déter¬ ritorialisée. » (Guattari et al., 1996, p. 32)
> [!accord]
> « J’évoque en fait une nouvelle façon de poser des territoires de vie, d’affirmer des résistances civiles, de défendre des minorités, même si elles peuvent imploser dans d’autres formes d’abolition. Il s’agit de les réinsérer dans les rapports de forces, de pouvoirs existants, au lieu de les figer en pure utopie comme dans les années soixante ; les articuler avec les forces qui s’affirment au Parlement, dans le syndicalisme, etc., est donc nécessaire. » (Guattari et al., 1996, p. 32)
> [!accord]
> « Sinon ces pratiques moléculaires, ces luttes de désir retomberaient inexorablement dans la récupération, la mar¬ ginalisation, le dérisoire. » (Guattari et al., 1996, p. 32)