Auteur : [[Razmig Keucheyan]]
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# Note
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Soit la localisation des décharges toxiques aux États-Unis : si vous voulez savoir où un stock de déchets donné a le plus de chances d’être enfoui, demandez-vous où vivent les Noirs, les Hispaniques, les Amérindiens et autres minorités raciales
> [!accord] Page 4
Faute de s’attaquer à la racine du problème, la stratégie néolibérale choisit de financiariser l’assurance des risques climatiques. C’est l’essor de la « finance environnementale » comme réponse capitaliste à la crise
## Introduction
> [!approfondir] Page 12
C’est alors que la protestation prit une forme extrajudiciaire : manifestations, sit-in, boycotts, désobéissance civile, marches, meetings, coupures de routes… Ces actions conduisirent à l’arrestation de plus de cinq cents personnes, parmi lesquelles des élus locaux et fédéraux. Le mouvement n’obtint pas l’abandon du projet dans l’immédiat et le site ne fut décontaminé que dans les années 2000
> > [!cite] Note
> Ptin j'ai l'impression qu'on gagne rien... C'est compliquer de continuer de croire a la désobéissance civil
> [!information] Page 13
Dans ses politiques de gestion de l’environnement et des ressources, l’État favorise systématiquement les populations blanches et les classes moyennes et supérieures, qu’il préserve de ce type de nuisances
> [!accord] Page 13
Cette discrimination raciale n’est pas forcément intentionnelle de la part des pouvoirs publics, même si elle l’est souvent. Elle est systémique, c’est-à-dire qu’elle procède d’une logique en partie indépendante de la volonté des individus. Ce qui a permis au mouvement du comté de Warren de prendre de l’ampleur, c’est donc sa capacité à monter en généralité, à « accrocher » une revendication locale à une injustice globale
> [!information] Page 13
Cette approche de la crise écologique prend le contre-pied d’une opinion dominante aujourd’hui. Un consensus bien installé soutient qu’afin de régler le problème du changement environnemental, l’humanité doit « dépasser ses divisions ». Ce consensus est impulsé par les partis écologistes, dont beaucoup – pas tous – sont nés dans les années 1970 de l’idée que l’opposition entre la gauche et la droite est caduque ou secondaire
> [!accord] Page 14
Il est également promu, en France, par des personnalités de la « société civile » comme Yann Arthus-Bertrand ou Nicolas Hulot, dont il existe des équivalents dans la plupart des pays
> [!information] Page 14
[[Dipesh Chakrabarty]], l’un des principaux théoriciens du postcolonialisme, auteur du classique Provincializing Europed, a récemment publié un texte intitulé « Le climat de l’histoiree ».
^1306af
> [!approfondir] Page 15
Il est peu probable, en d’autres termes, que rassembler l’espèce autour d’objectifs communs soit une condition de la résolution de cette crise. Celle-ci suppose peut-être au contraire la radicalisation de ces oppositions, c’est-à-dire la radicalisation de la critique du capitalisme
> [!accord] Page 16
La financiarisation et la guerre : ce sont les deux solutions que le capitalisme, depuis qu’il existe, applique aux situations de crise qu’il traverse et à l’aggravation des inégalités qu’elles engendrent
> [!accord] Page 18
La crise environnementale à laquelle elle donne lieu suscite d’ores et déjà un surcroît de catastrophes naturelles, la raréfaction de certaines ressources, des crises alimentaires, une déstabilisation des pôles et des océans, et des « réfugiés climatiques » par dizaine de millions à l’horizon 2050
## Racisme environnemental
> [!information] Page 20
L’épisode du comté de Warren évoqué dans l’introduction est l’acte de naissance du mouvement pour la justice environnementale. C’est le point de départ d’un cycle de protestation dont l’une des expressions est née aux États-Unis, mais qui dispose d’importantes ramifications internationales et dont la principale caractéristique est de mettre en rapport le social – classe, genre, race – et la nature
> [!information] Page 20
Le mouvement pour la justice environnementale n’est issu ni du mouvement écologiste, qui naît dans les années 1950, ni du mouvement environnementaliste, qui apparaît au XIXe siècle, mais du mouvement des droits civiques. Il constitue un effet différé, une bifurcation inattendue de ce dernier, survenue dans le dernier tiers du XXe siècle, à une époque où ce mouvement est en perte de vitesse
> [!désaccord] Page 21
Ce répertoire d’action se caractérise par son pacifisme fondamental, qui vise à montrer que la violence et la répression sont du côté du système, et non de ceux qui le contestent
> > [!cite] Note
> Pas convaincu de leur take, j'aurai dit l'opposé mais bon
> [!information] Page 21
La question de la gestion des déchets s’était d’ailleurs déjà manifestée au sein de ce dernier. La veille de son assassinat, en avril 1968, Martin Luther King était allé soutenir une grève des éboueurs à Memphis, dont la plupart des protagonistes étaient noirs. Ces éboueurs protestaient contre la dangerosité et l’insalubrité de leurs conditions de travail, ainsi que contre les bas salaires
> [!accord] Page 21
Les catégories populaires et les minorités raciales ont en général une propension moindre à recourir à la loi pour empêcher l’enfouissement de déchets toxiques à proximité de leurs quartiers. C’est l’une des raisons pour lesquelles l’État se débarrasse de ces déchets dans ces endroits-là. Leur capacité à se mobiliser efficacement, à faire mouvement, est également en principe plus faible, du fait d’une dotation en « capitaux » – au sens de [[Pierre Bourdieu]] – moins grande
^f45294
> [!information] Page 21
Il repose sur des considérants de classe, de race et de genre. La protestation du comté de Warren incluait aussi des Blancs, par exemple des fermiers refusant de voir leurs terres polluées par le BPC. Il s’agissait d’une coalition d’intérêts et de revendications hétérogènes, comme toute protestation sociale d’ampleur. Mais la spécificité de ce mouvement consista à rendre visible l’injustice raciale et sociale qui sous-tend la gestion des déchets toxiques.
> [!information] Page 22
Cette étude a été réalisée par la United Church of Christ, une Église progressiste noire, déjà très active dans le mouvement des droits civiques dans les années 1950. Dans le mouvement pour la justice environnementale comme dans celui des droits civiques, les Églises jouent un rôle crucial. Les Noirs ayant été dépossédés de toute institution politique autonome aux États-Unis depuis la période de l’esclavage, elles ont une fonction organisatrice de l’émancipation, elles sont des vecteurs de lutted. Certaines d’entre elles se trouvent à l’avant-garde des problématiques écologiques.
> [!désaccord] Page 24
Le Sierra Club compte à l’heure actuelle plus d’un million et demi de membres. Son objectif, comme l’indique sa feuille de mission, est « d’explorer, d’apprécier et de protéger les lieux sauvages (wild places) de la planèteg ».
> [!information] Page 24
En 1972 déjà, sous la pression du mouvement des droits civiques et autres mouvements contestataires du moment, le Sierra Club mena une enquête parmi ses membres pour déterminer s’ils souhaitaient que l’association développe des politiques spécifiquement destinées aux pauvres et aux minorités. Deux tiers de ses membres répondirent par la négativei. L’argument couramment avancé était que la nature est un bien universel, dont tout le monde peut jouir sans distinction. Mettre en œuvre des politiques spécifiques contredirait ce caractère « transcendant » du rapport de l’homme et de la nature
> > [!cite] Note
> On vois pas les couleurs. Désolé
> [!information] Page 25
C’est ce que le sociologue noir Robert Bullard, l’un des intellectuels organiques du mouvement pour la justice environnementale et auteur du classique Dumping in Dixie. Race, Class, and Environmental Quality, appelle l’élitisme environnemental des mouvements écologistes dominantsj. La couleur de l’écologie n’est pas le vert, mais le blanc
> [!information] Page 28
Les Noirs ont par ailleurs été moins fréquemment secourus et moins vite lorsqu’ils l’ont été. Ils ont en revanche été plus souvent pris pour cible par la Garde nationale lors des opérations de « pacification » de la ville. Le facteur race est en outre étroitement lié au facteur classe. Or les pauvres ont une propension moindre à posséder une voiture, ce qui rend la fuite plus difficile en cas de catastrophe
> [!information] Page 28
Katrina salad est le nom donné par ces derniers aux légumes provenant des jardins communautaires de la ville, cultivés par les classes populaires, une expression qui ironise sur les substances toxiques qu’ils contiennents
> [!accord] Page 28
À l’époque moderne, il a une dimension systémique. Cela signifie qu’indépendamment de ce qu’elles pensent, certaines catégories d’individus tirent – involontairement – avantage de la logique raciste, du fait qu’elles sont du « bon » côté des discriminations et que d’autres en pâtissent.
> > [!cite] Note
> Def validé
> [!information] Page 28
Comme le dit Laura Pulido, la plus sophistiquée des théoriciennes du racisme environnemental, il y a une « sédimentation spatiale des inégalités racialest »
> [!accord] Page 29
Plus on passe du niveau microsocial au niveau macrosocial, plus les forces à l’œuvre sont abstraitesu, plus elles s’éloignent de l’intentionnalité des individus – sans pour autant cesser d’être racistes
> [!approfondir] Page 29
Imaginons une entreprise polluante qui s’installe près d’un quartier noir aux États-Unis, ou d’une cité en banlieue d’une grande ville française où vit une majorité d’immigrés et de descendants d’immigrés. La décision de l’entreprise de s’installer à cet endroit est motivée, par hypothèse, par un seul critère : le prix du foncier, qui défie toute concurrence à cet endroit. C’est donc un choix « rationnel », au sens de l’économie néoclassique (de la théorie dite du « choix rationnel »). S’agit-il d’une décision raciste ? Pas si le critère retenu est l’intention, puisque la seule intention de l’entreprise est de minimiser ses coûts.
> [!information] Page 31
C’est pourquoi, depuis les années 1980, des organisations britanniques proches du mouvement pour la justice environnementale telles que le Black Environmental Network organisent des voyages dans le countryside pour ces minoritésaa
> [!information] Page 31
C’est également l’occasion de s’adonner à des activités comme le « jardinage culturel », qui permet à des personnes originaires d’un pays de cultiver des plantes qui en proviennent et ainsi, via la nature, de renouer avec lui
> [!information] Page 33
Le saturnisme ne resurgit pas n’importe où. On l’observe principalement dans l’habitat ancien dégradé, du type de celui que l’on trouve dans les quartiers populaires de la ville. Les catégories de la population affectées par ce mal sont celles qui résident dans ces immeubles : principalement à cette époque des immigrés africains subsahariens. Une enquête menée en 2002 pour le compte de la mairie de Paris recense plus d’un millier d’immeubles insalubres dans la capitaleaf. 80 % de personnes qui y habitent sont des immigrés, dont un tiers de sans papiers. Il s’agit d’une population très pauvre, le revenu mensuel de 40 % de ces personnes étant de moins de 300 euros
> [!information] Page 35
Dans une tribune parue en juin 2007 dans le Washington Post, le secrétaire général des Nations unies Ban Ki-moon affirme que le conflit au Darfour est lié à des paramètres climatiques : « Ce n’est pas un hasard, déclare-t-il, si les violences ont commencé en période de sécheresseaj. »
> [!information] Page 36
La déforestation s’accélère : 600 000 hectares de forêts sont perdus chaque année de 1990 à 2000ao. La [[Désertification (Data)|désertification]], l’érosion des sols, une pluviométrie en baisse conduisent au déclin de la production agricole. En même temps que l’eau se raréfie, la population du Darfour augmente. Elle passe de 1,1 million d’habitants en 1956 à 7,5 millions en 2008ap
> [!information] Page 38
Si, comme le dit [[Karl Marx|Marx]], le capital est un « rapport social », ce rapport intègre à sa logique la « nature » ou l’« environnement ». En somme, l’intersection entre la classe, la race et le genre doit être complétée par une quatrième dimension, qui vient la compliquer en même temps qu’elle est elle-même compliquée par les trois autres : la nature
^4b0709
> [!information] Page 39
Le « grand partage » entre la nature et la culture a fait l’objet de nombreux travaux au cours des dernières décennies, notamment du côté de l’anthropologie des sciences d’inspiration « constructiviste »aw. [[Bruno Latour]], en particulier, s’est fait une spécialité de démontrer le caractère « construit » de ce grand partage, dans la perspective d’une théorie générale de la (non-) modernité
^4941ec
> [!information] Page 40
La révolte de Cochabamba en Bolivie au début des années 2000 et les guerres de l’eau en Amérique latine de manière plus générale sont des exemples des conflits qu’elles ont suscitésbb. Des inégalités d’accès à l’eau existent également en France. En Guyane, 15 % de la population n’a pas accès à l’eau potable, et ce taux approche les 50 % dans certaines régionsbc
> [!information] Page 41
La paupérisation de la population du fait de la crise conduit nombre de Grecs à choisir la seconde option. Cela a conduit à une augmentation vertigineuse des coupes illégales de bois et à une accélération de la déforestation. Du fait des mesures d’austérité supposées redresser les finances du pays, le nombre de gardes forestiers a été réduit, facilitant d’autant les coupes illégales. La Direction générale à l’environnement de l’Union européenne – la même Union européenne qui impose ces mesures d’austérité aux Grecs – s’est alarmée de cette accélération de la déforestation et a invité le gouvernement grec à prendre les mesures qui s’imposentbi.
> > [!cite] Note
> L'interconnexion des problèmes avec l'écologie et le sociale sont ici bien représentés
> [!accord] Page 43
Les ménages disposant d’un revenu élevé ont à l’inverse un impact négatif plus important sur l’environnement. Certaines données conduisent toutefois à nuancer cette conclusion. Par exemple, la catégorie de la population qui accomplit les trajets motorisés les plus longs en région parisienne est celle des ouvriers, de l’ordre de 7,4 km par déplacement, ce qui est davantage que les classes moyennes et supérieuresbp. Cela s’explique parlefait qu’ils habitent en général plus loin de leur lieu de travail, du fait de revenus moins importants et du moindre coût du foncier en périphérie. Cela n’invalide nullement le constat de l’existence d’inégalités environnementales, mais démontre que celles-ci se mêlent à d’autres types d’inégalités
> [!information] Page 44
L’absence de statistiques dites « ethniques » en France empêche de déterminer précisément qui furent les victimes de l’explosion de l’usine, ou qui participe au mouvement des « sans fenêtres ». Des données recueillies sur le terrain permettent toutefois d’entrevoir l’ampleur du racisme environnemental à l’œuvre à cet endroit. Une pétition des « sans fenêtres » adressée à la mairie par 70 locataires du Mirail contient par exemple plus d’une moitié de noms à consonance arabebr. Les inégalités sociales et raciales sont le fruit d’une lente sédimentation à Toulouse
> [!accord] Page 45
À l’époque moderne, le caractère inextricablement mêlé de la race et de la nature se manifeste dans un écosystème particulier : la plantation esclavagiste. La plantation est un fait social total, qui ne laisse aucune sphère intacte. La nature elle-même est saisie par sa logique, en tirer profit étant après tout sa finalité.
> [!accord] Page 45
Sans esclavage il n’y a pas de coton et sans coton il n’y a pas d’industrie moderne. C’est l’esclavage qui a donné de la valeur aux colonies ; ce sont les colonies qui ont créé le commerce mondial ; c’est le commerce mondial qui est la condition sine qua non de l’industrie mécanisée à grande échelle
> [!accord] Page 45
La culture du coton, par exemple, suppose la mise en relation d’entités diverses : la fibre de coton elle-même, mais aussi de l’eau, des sols, du soleil, un système social et une idéologie racistes, des technologies de contrainte (le fouet du maître), un cadre légal… Au cœur de cette relation symbiotique se trouve le travail de l’esclave.
> [!information] Page 46
Afin d’en tirer le meilleur parti sans toutefois le briser, le maître est forcé de faire des concessions. C’est ainsi que les esclaves sont parfois autorisés à cultiver un potager, qui leur permet d’améliorer leur diète quotidiennebw
> [!information] Page 47
Le contrôle du ventre des femmes esclaves est par ailleurs crucial pour le planteur, car la reproduction est, comme on l’a vu, un moyen d’accroître la main-d’œuvre et donc la production. De la part de ces femmes, le refus de procréer constitue donc un acte de résistance, un refus de mettre au monde des êtres qui vivront dans la servitudebx
> [!approfondir] Page 47
Or, hasard de la sélection naturelle, le coton contient du gossypol, une molécule qui, lorsqu’elle est mâchée, réduit la fertilité.
> [!information] Page 47
Dans le même registre, on trouve en Chine aujourd’hui ce que les Chinois eux-mêmes appellent des « villages du cancer », dans lesquels la santé des populations est mise en danger par des taux de pollution anormalement hauts liés au développement industriel du paysca. (Il ne semble pas dans ce cas qu’une ethnie en soit particulièrement victime, le phénomène affecte la paysannerie de manière plus indiscriminée.)
> [!information] Page 47
En 1830, le Congrès américain – Andrew Jackson est alors président – vote l’Indian Removal Act, qui ordonne la déportation des Amérindiens de leurs terres d’origine vers l’ouest, au-delà du fleuve Mississippi. Dix ans plus tard, il n’en reste pratiquement plus à l’est de cette frontière
> [!accord] Page 48
Avec la montée en puissance économique et militaire des États-Unis, l’armée états-unienne a besoin de lieux pour l’exercice de ses troupes, mais aussi pour tester l’armement et en particulier, dès les années 1940, l’arme nucléaire. Un colonialisme nucléaire se met ainsi en place, qui voit les complexes militaro-nucléaires être localisés près des territoires occupés par les Native Americans, notamment le plus vaste de ces complexes dans le Nevadacb.
> [!accord] Page 48
Ce contrôle passe par la mise en œuvre d’une véritable politique d’« endiguement » à l’égard de la paysannerie et de son accès libre à ces ressources. Or l’enjeu n’est pas seulement militaire, il est également économique. Il s’agit en effet de transformer les ressources naturelles en propriété privée, autrement dit de les marchandiser
> [!accord] Page 49
Les gardes forestiers sont le symbole de la « pénalisation croissante » de l’usage des forêts dont parle Daniel Bensaïd
> [!approfondir] Page 49
Les forêts sont en ce sens partie intégrante de l’histoire de France. La notion de « patrimoine » émerge à cette époque, elle s’applique aussi bien à la nature qu’à des objets culturels. En ces temps de troubles révolutionnaires, depuis la fin du XVIIIe siècle, les forêts constituent un havre de stabilité, ce qui n’empêche pas bien sûr qu’elles soient aussi exploitées à des fins économiques ou militaires. C’est pourquoi tout doit être mis en œuvre pour les préserver
> > [!cite] Note
> La privatisation des forêt a but d'enrichissement et de séparation des bon et mauvais utilisateur. Intéressant, mais je pense à ces limites à l'heure actuels. A voir
> [!accord] Page 49
Comme l’écrit l’agronome François Trottier dans la phrase placée en exergue de ce chapitre, tirée d’un ouvrage significativement intitulé Reboisement et colonisation (1876) : « C’est par le reboisement que notre race conservera ses facultés européennes. » La dégradation de la nature est perçue comme une menace pour la civilisation (européenne). Non seulement parce qu’elle est une ressource dont il est possible de tirer profit, mais parce que, l’environnement forgeant le caractère, sa détérioration conduira nécessairement à un affaiblissement de ce dernier
> [!information] Page 50
Dans les dernières décennies du XIXe siècle, ses responsables convainquent ainsi l’armée de mettre en place des unités militaires à ski pour assurer la sécurité des zones frontalières en montagnech. L’objectif est non seulement de sécuriser l’espace alpin, mais aussi d’encourager la population à s’en rapprocher, la montagne ayant des vertus régénératives sur le caractère. L’histoire du ski en France est une histoire militaire
> [!accord] Page 52
Les familles acquièrent une ou deux voitures, ce qui leur permet de se rendre dans les parcs naturels ou à la montagne. La « société de consommation » qui apparaît à ce moment-là inclut la consommation de la nature.
> [!accord] Page 52
Comme le dit Carl Stokes, maire de Cleveland de 1968 à 1971 et premier élu noir d’une grande ville américaine, « l’obsession de la nation pour l’environnement a rendu possible ce que George Wallace n’était pas parvenu à faire : détourner l’attention des problèmes des Noirs américains » (George Wallace était un démocrate de l’Alabama partisan de la ségrégation raciale)cn
> [!accord] Page 53
L’émergence de la wilderness au XIXe siècle est indissociable de celle, historiquement concomitante, de la whiteness, c’est-à-dire de la blancheurco
> [!information] Page 53
Dans les premières décennies du XXe siècle, 60 % des victimes d’inondations sont noires, un phénomène que l’on a observé encore un siècle plus tard à La Nouvelle-Orléans, à l’occasion du passage de l’ouragan Katrina
> [!accord] Page 53
La blancheur, whiteness, est l’antonyme de cette saleté et de cette sombreur, elle est synonyme de puretécs. Cette pureté caractérise non seulement les classes dominantes blanches et leurs quartiers, mais également la nature, qui est leur espace privilégié
> [!information] Page 54
La différence est qu’avec la montée en puissance des catégories raciales tout au long du XIXe siècle, aux États-Unis mais aussi plus généralement, cette idée entre en interaction et s’enracine dans un système politique et économique racialisé. Wilderness et whiteness sont donc deux catégories – plus précisément deux institutions – qui se soutiennent l’une l’autre
> [!information] Page 55
Des organisations telles que le WWF (World Wildlife Fund, fondé dans les années 1960) ont diffusé le modèle américain des parcs naturels, en alliance plus ou moins étroite avec les élites des pays concernés, en Asie et en Afrique notamment
> [!information] Page 55
L’historien indien Ramachandra Guha raconte ainsi la façon dont le « Project Tiger », qui préconisait dans les années 1970 la création de réserves où le tigre du Bengale serait protégé, a conduit au déplacement de nombreux villages et de leurs habitantscw
> [!information] Page 56
L’implantation de ce modèle s’appuie sur une longue histoire d’écologie coloniale ou d’« impérialisme vertcx ». C’est ce qu’illustre le cas du Kenya. Des politiques de conservation de la nature sont introduites dans ce pays par les Britanniques dès la fin du XIXe sièclecy.
> [!accord] Page 56
Ces politiques entrent fréquemment en conflit avec les intérêts des populations locales. Elles empêchent par exemple le développement agricole de certaines régions, au détriment du bien-être des populations, réservant de vastes territoires à la chasse ou au safari. Elles condamnent à de lourdes amendes les atteintes illégales aux bêtes sauvages, y compris lorsque celles-ci menacent le bétail ou les humains, et ne prévoient guère de dédommagements en cas de décimation des troupeaux.
> [!information] Page 56
Lors de la décolonisation, les organisations environnementalistes internationales s’affairent afin que ces politiques de préservation ne soient pas remises en question. Les politiques économiques modernisatrices ou « développementalistes » souvent prônées par les régimes nouvellement indépendants leur font craindre une exploitation immodérée de la nature
> [!information] Page 57
Depuis 1888, date de sa création aux États-Unis, le National Geographic – l’un des outils pédagogiques les plus utilisés dans les cours de géographie dans le monde – n’a cessé d’essentialiser l’Orient, de le renvoyer à un « primitivisme » originel et immuable
> [!accord] Page 57
D’où l’idée avancée par certains historiens selon laquelle l’écologie, et même le concept moderne de nature, trouve l’une de ses origines dans la colonisation et, plus précisément, dans le contrôle de la nature des régions coloniséesda
> [!accord] Page 59
Cette rupture est révélatrice d’une division qui a structuré le champ politique au XXe siècle. Aux syndicats la défense des emplois et de l’industrie qui les procure, à l’exclusion parfois d’autres préoccupations, comme la sécurité des riverains ou des salariés eux-mêmes
> [!information] Page 60
Les syndicats prennent par ailleurs conscience, au cours des années 1960, de l’importance des thématiques écologiques. Cette prise de conscience s’opère, en France et ailleurs, sous l’impulsion des mouvements sociaux qui s’en réclament
> [!information] Page 60
La première occurrence de cette notion dans la presse syndicale semble remonter à 1965. Elle apparaît dans l’hebdomadaire de la CFDT Syndicalisme Hebdodk et désigne tout ce qui relève du logement, des transports, de la culture, de la « qualité » ou du « cadre » de vie, des « nuisances » (pollutions, bruits…). Le « cadre de vie », ce n’est pas seulement le « hors travail »
## Financiariser la nature : l'assurance des risques climatiques
> [!approfondir] Page 73
L’assurance vie est une forme d’assurance sur la nature, puisque ce sont en dernière instance les corps – la vie – qui sont assurés.
> [!accord] Page 74
L’assurance en général, et celle des catastrophes naturelles en particulier sont saisies par ce double mouvement de privatisation et de financiarisation du capital. Il y a un régime néolibéral en matière d’assurance, tout comme il y en a dans d’autres domaines : les retraites, la recherche scientifique, le management d’entreprise ou le commerce mondial
> [!information] Page 82
Au cours des vingt dernières années, le principal risque naturel est les inondations, suivi de la sécheresse
> [!information] Page 82
Un ouragan à Taiwan pourra ainsi non seulement détruire des biens matériels et faire des victimes humaines, mais également interrompre des circuits de production ou d’assemblage globaux, par exemple dans le domaine informatique, dont Taiwan est un maillon important
> [!information] Page 83
Pour l’année 2011, la plus récente pour laquelle des chiffres sont disponibles, Swiss Re a comptabilisé 325 catastrophes en tout, dont 175 « naturelles » et 150 « techniques ». Il est intéressant de constater que le réassureur comptabilise le « printemps arabe » de 2011 comme « catastrophe technique »
> [!information] Page 84
Une boucle causale relie donc l’augmentation de l’espérance de vie, l’urbanisation et les coûts que ces deux tendances induisent pour l’assurance
> [!accord] Page 87
L’attention de Beck se porte en particulier sur les risques technologiques, par exemple la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986. De tels risques ne respectent plus les frontières, qu’elles soient spatiales (le nuage de Tchernobyl ne s’est pas arrêté aux frontières nationales), sociales (il a affecté riches et pauvres sans distinction de classe) ou temporelles (ses conséquences se manifestent sur plusieurs décennies, voire siècles). Ils préfigurent la fin de l’État-nation, dont le propre est d’être territorialement délimité, et qui est par définition incapable de les gérer. Ils appellent ainsi l’émergence d’un nouveau « cosmopolitisme », dont Beck s’est fait le chantre au cours des années récentesaj
> [!information] Page 89
Cas par excellence : l’amiante, qui sans être une catastrophe à proprement parler, c’est-à-dire un événement ponctuel interrompant le cours de la vie sociale normale, est à ce jour le phénomène qui a coûté le plus cher à l’industrie de l’assurance aux États-Unisar.
> [!information] Page 90
Le terrorisme a également eu un impact important sur le secteur de l’assurance. On l’a dit, le 11 septembre 2001 est l’un des événements les plus coûteux de l’histoire de l’assurance. Le fait que New York, l’une des villes les plus riches du monde et l’un des centres financiers mondiaux, ait été frappé n’est naturellement pas étranger à ce constat. Londres est une autre ville globale affectée par le terrorisme. L’Armée républicaine irlandaise (IRA) a frappé la capitale britannique à plusieurs reprises, notamment la City en avril 1993
> [!information] Page 93
Tous les effets du changement climatique ne peuvent être assurés. La [[Désertification (Data)|désertification]] ou la montée du niveau des mers ne peuvent par exemple faire en soi l’objet d’une assurance. La raison en est qu’il s’agit de phénomènes qui ne sont pas spatialement et temporellement localisables : ils sont progressifs plutôt que ponctuels et ils concernent à des degrés divers l’ensemble de la planète. Or la délimitation spatio-temporelle est une condition de l’assurabilité. En revanche, ce genre de phénomène peut interagir avec d’autres phénomènes et donner lieu à des catastrophes qui elles sont assurables
^57d145
> [!information] Page 97
Ces agences emploient fréquemment des scientifiques issus des sciences naturelles afin de les aider à construire leurs modèlesbi. La société Nephila Capital Limitedbj, basée aux Bermudes, s’est ainsi assuré le concours d’océanographes pour modéliser les ouragans dans les Caraïbes
> [!accord] Page 98
Pour que des marchandises soient échangées sur un marché, il faut qu’elles soient commensurables, c’est-à-dire que l’on puisse leur assigner un prix. C’est le vieux problème du passage de la valeur d’usage à la valeur d’échange, en d’autres termes de la transformation d’un objet quelconque en marchandise
> [!information] Page 99
Les marchés carbone reposent sur deux principaux mécanismes : un système de quotas et d’échange de gaz à effet de serre (cap and trade) ; et un système de compensation (offset)bt. L’État ou une autre autorité publique (ONU, Union européenne…) fixe un plafond d’émissions de CO2 (ou autres gaz à effet de serre) à une entreprise, qu’elle ne doit pas dépasser
> [!accord] Page 101
Ce mécanisme de compensation existe aujourd’hui non seulement pour les droits à polluer, mais aussi par exemple dans le domaine de la préservation de la biodiversité, qui permet que des pertes ou dommages en la matière à un endroit soient compensées par des améliorations à d’autres, selon certaines conditions
> [!information] Page 104
La micro-assurance peut être considérée comme une forme sophistiquée d’« accumulation par dépossession », au sens de David Harveycc.
> [!approfondir] Page 105
Comme l’a montré [[Michel Foucault]], le néolibéralisme a peu à voir avec le « laisser faire » et tout à voir avec l’intervention permanente de l’État en faveur des marchés
^83a03b
> [!information] Page 108
On peut relever au passage que l’assurance islamique connaît aujourd’hui une croissance annuelle de 25 %, alors que le marché de l’assurance traditionnelle a crû en moyenne de 10 % au cours des dernières annéescp
> [!accord] Page 112
Ce type de risque ne manquera pas d’engendrer des dépenses sanitaires supplémentaires, approfondissant d’autant la crise fiscale de l’État
> > [!cite] Note
> Exemple récent avec le covid
> [!information] Page 112
Dans le cadre d’un swap, deux entreprises que les variations du climat affectent de manière opposée peuvent décider de s’assurer mutuellement. Si une entreprise énergétique perd de l’argent en cas d’hiver trop doux, et une entreprise organisant des événements sportifs en cas d’hiver trop rigoureux, elles se verseront un montant prédéterminé selon que l’hiver est doux ou rigoureuxcw
> [!information] Page 113
trois théoriciens de l’assurance suggèrent de mettre en place des species swaps, une forme de dérivé portant sur le risque de disparition des espècesdc. L’interpénétration de la finance et de la nature revêt ici une de ses formes les plus radicales. L’idée est simple : il s’agit de rendre la préservation des espèces profitable pour les entreprises, de façon à les inciter à prendre soin d’espèces menacées qui se trouveraient sur leur territoire
> [!approfondir] Page 115
L’État moderne doit être conçu comme l’interface entre le capital et la nature. Il est l’instance qui régule l’usage des conditions de production, afin que celles-ci puissent être exploitées par le capital. La nature livrée au capital sans interface serait rapidement détruite par lui. Si le capitalisme a besoin de l’État, c’est donc d’abord dans un but d’autolimitation. C’est aussi, on l’a vu, dans un but de construction de la nature. C’est la raison pour laquelle la question centrale pour tout mouvement écologique digne de ce nom est la question de l’État
> [!information] Page 115
L’ouragan Katrina a par exemple détruit des volumes colossaux de capital. Mais il a aussi permis l’expulsion et la rentabilisation de quartiers jusque-là populaires et donc peu rentables, ainsi que la privatisation massive des services publics, notamment les écoles
## Les guerres vertes, ou la militarisation de l'écologie
> [!information] Page 126
Thomas Schelling, un grand théoricien des jeux contemporain, prix Nobel d’économie en 2005, et l’un des concepteurs de la doctrine américaine de la dissuasion nucléaire. Schelling continue depuis lors à intervenir sur la question du changement climatique, du point de vue de ses conséquences économiques et géopolitiquese. C’est un partisan de la « géo-ingénierie », c’est-à-dire de la mise en œuvre de manipulations technologiques du climat pour lutter contre le réchauffementf
> [!accord] Page 129
La classe politique, de son côté, est victime d’un « court-termisme » qui la rend inapte à intégrer le changement climatique dans ses calculs
> [!désaccord] Page 130
En liberté, l’humanité court à sa perte, car elle ne peut s’empêcher d’infliger des dommages irréparables à son milieu. Seule une « dictature bienveillante » est à même de prendre les mesures qui s’imposent pour que son « salut physique » soit assuré.
> [!information] Page 130
Deux événements récents qui illustrent cette tendance sont le tsunami de 2004 dans l’océan Indien, et l’ouragan Katrina en 2005 à La Nouvelle-Orléans, deux tragédies très largement militarisées
> > [!cite] Note
> En vrai on peut, je pense, ajouter l'envoi du raid par macron au Antilles pour gérer le covid / manque d'eau. En plus d'être une situation néo coloniale on est aussi sur un cadre militarisé d'une gestion de crise
> [!information] Page 132
La « multiplication de menaces » concernera notamment l’eau. La plupart des grands fleuves asiatiques – Indus, Gange, Yangzi, Mékong… – trouvent leur source en Himalaya. La fonte des glaciers de cette région, couplée avec la construction de barrages hydroélectriques, menace de susciter d’importantes pénuries d’eau dans la régionx
> [!information] Page 135
Par ailleurs, plus de 15 % du pétrole états-unien provient aujourd’hui d’Afrique. À l’horizon 2020, ce pourcentage pourrait atteindre entre 25 % et 40 %.
> [!information] Page 136
En 1966 déjà, sous la présidence de Lyndon B. Johnson, une flotte américaine délivra de la nourriture et des semences à l’Inde à l’occasion d’une famine. Le slogan en vigueur à l’époque était « Feed’em or fight’em » : les famines pourraient donner lieu à des révolutions hostiles aux États-Unis dans les pays du tiers monde, il est donc préférable de nourrir les populations concernées avant qu’elles aient lieuai
> [!désaccord] Page 137
L’hypothèse sous-jacente, hégémonique dans les organisations internationales œuvrant dans le domaine du développement, est que la « responsabilisation » – empowerment – des individus est le meilleur moyen d’obtenir des résultats en matière de préservation de l’environnement
> [!information] Page 139
Peu d’armées au monde disposent de l’expérience de l’armée indienne en matière de contre-insurrection. Et pour cause : les guérillas sont courantes dans le pays depuis son indépendance. La plus connue d’entre elles est celle des naxalites, qui emprunte son nom au village de Naxalbari, situé dans le Bengale occidental, dans l’est du pays. Cette rébellion – dont certains secteurs sont d’inspiration maoïste – apparaît dans les années 1960, sur le terreau de la surexploitation forestière
> [!approfondir] Page 141
Mouammar Kadhafi disait quant à lui du pétrole qu’il était le « carburant de la révolution », à l’échelle libyenne aussi bien que panafricaine
> [!accord] Page 142
Nationalisme, antiimpérialisme et ressources naturelles sont donc inextricablement mêlés
> [!information] Page 142
En France, la lutte contre l’extension du camp militaire du Larzac au début des années 1970 relève de cette critique. Certaines armées prennent le problème à bras-le-corps, ce qui donne lieu à l’émergence d’un « environnementalisme militaire » ou d’une « conservation kakibc »
> [!information] Page 142
Il a par exemple été démontré que la zone militaire qui sépare les deux Corées renferme plusieurs dizaines d’espèces raresbe
> [!information] Page 143
Signalons au passage que l’agent orange est une création de la multinationale Monsanto, aujourd’hui spécialisée dans la production d’OGM. Dans le cadre de l’opération Ranch Hand, entre 1962 et 1971, des dizaines de milliers de mètres cubes d’herbicides sont ainsi déversées sur le pays. 3,3 millions d’hectares de végétation y sont exposésbg. 22 000 km2 de forêts ont été défoliés, à savoir plus de 20 % des régions forestières du pays
> [!accord] Page 144
La transition du bois au charbon, du charbon au pétrole, puis du pétrole au nucléaire transforme la façon de faire la guerre. Ces transitions sont partielles, chaque ressource montante se superposant – pour un temps au moins – à la précédente
> [!information] Page 146
Au début du XXe siècle, 90 % des victimes des guerres sont des militaires. Lors de la Seconde Guerre mondiale, ce pourcentage passe à 50 %. À la fin des années 1990, 80 % des victimes sont des civilsbu
> [!information] Page 149
Deux des trois aquifères dont dépend l’approvisionnement en eau d’Israël se trouvent sous le territoire de la Cisjordanie. L’accès aux ressources hydriques n’est bien sûr pas le même selon que l’on est arabe ou israélien. Les colons israéliens consomment quatre fois plus d’eau que les Arabesch
> [!information] Page 151
En outre, les populations des pays en voie de développement consacrent une part plus grande de leurs revenus à l’alimentation, de l’ordre de 35 %. Dans les pays développés, ce pourcentage tombe à 10 %. Cela implique que les variations du prix des denrées alimentaires sur le marché mondial, du fait de sécheresses par exemple, ont un impact plus important sur leur pouvoir d’achat. Ainsi, les neufs principaux pays importateurs de blé se trouvent au Moyen-Orient, une région peu propice à sa culture. Or sept d’entre eux se sont trouvés aux avant-postes lors du « printemps arabe »co.
> [!information] Page 152
Le Dust Bowl évoqué par John Steinbeck dans Les Raisins de la colère en est un célèbre exemple. Dans les années 1930, lors de la Grande dépression, le sud-ouest des États-Unis – Oklahoma et Texas notamment – est victime de tempêtes de poussière. La combinaison de sécheresses récurrentes et de l’agriculture intensive rend les terres improductives. Ceci donne lieu à la migration des « Okies », les fermiers habitants de l’Oklahoma (et des États alentours), dont beaucoup deviennent ouvriers agricoles en Californie. Bien que ses modalités soient différentes, l’ouragan Katrina est un Dust Bowl contemporain
> [!accord] Page 153
L’argument est le suivant : l’extension inconsidérée de la catégorie de « réfugié » risque de mettre en danger des personnes qui le sont vraiment au regard du droit international, en particulier les réfugiés « politiques ».
> [!approfondir] Page 153
Le « rapport Stern », remis au gouvernement britannique en 2006, consacre également des développements aux réfugiés climatiques. Ce rapport, du nom de l’économiste spécialiste du « développement durable » Nicholas Stern, fait autorité dans l’écologie mainstream sur tout ce qui concerne l’économie et la quantification du changement climatique
> > [!cite] Note
> Les stern sont pètes couilles de père en fille ? Mdr
> [!information] Page 157
Plus généralement, 10 % des émissions de carbone annuelles à l’échelle globale proviennent de l’activité militaire (toutes armées confondues)df.
> [!information] Page 157
Aux yeux des militaires, cette situation est intenable pour plusieurs raisons. La dépendance des armées occidentales à l’égard du pétrole les met à la merci de pays producteurs avec lesquels elles entretiennent de mauvaises relations. Au premier rang de ces pays se trouvent l’Iran et le Venezuela. Autre fournisseur des États-Unis, le Mexique se trouve en situation de quasi-guerre civile du fait du narcotrafic. Il arrive d’ailleurs fréquemment que les narcotrafiquants s’attaquent aux pipelines pétroliersdh
> [!information] Page 159
Remplir le réservoir d’une grosse voiture avec de l’éthanol équivaut à utiliser la quantité de maïs nécessaire pour nourrir une personne pendant un andl.
> [!approfondir] Page 161
James Lovelock, le père de l’« hypothèse Gaïa », a émis l’hypothèse en 2006, dans une tribune dans The Independent, que lorsque le réchauffement de la planète aura atteint des niveaux insoutenables, les derniers humains survivants iraient se réfugier en Arctiquedt.
> [!information] Page 162
La rapidité de ce réchauffement s’explique notamment par l’« effet albédo » : la fonte des glaces assombrit la surface de la terre, qui absorbe par conséquent davantage de chaleur (la neige et la glace reflètent les rayons du soleil), ce qui cause un réchauffement local, qui fait fondre davantage de glace, et ainsi de suite
> [!accord] Page 165
Le partage de l’Arctique, de ce point de vue, est perçu à travers le prisme du partage de l’Afrique au XIXe siècle, c’est-à-dire comme susceptible de donner lieu à des formes nouvelles de conflits interimpérialistes
> [!information] Page 165
Les Russes dominent militairement le pôle Nord, notamment parce qu’ils disposent d’une vingtaine de brise-glace, dont certains à propulsion nucléaire (le premier brise-glace à propulsion nucléaire remonte à la fin des années 1950, il se dénommait le [[Lénine]])
^2e8f2d
> [!information] Page 167
L’exploitation des ressources arctiques suppose l’installation d’infrastructures lourdes et sophistiquées, ainsi que la sécurisation de leur acheminement. Cette sécurisation est l’une des raisons qui conduiront les militaires à s’investir dans la région
> [!information] Page 168
Le Groenland lui-même songe à demander son indépendance du Danemark. Avec le réchauffement de la planète, cette région pourrait connaître un développement agricole considérable dans les décennies à venir. D’importantes quantités d’énergie hydroélectrique pourraient aussi y être exploitées dans les années à venirel
> [!accord] Page 169
Ce que l’on observe aujourd’hui en Arctique relève ainsi à la fois de tendances très anciennes et très nouvelles. Anciennes parce que le partage de l’Arctique est sous-tendu par la logique pluriséculaire du profit capitaliste. Nouvelles parce que cette logique s’entremêle désormais avec une autre, celle du changement climatique. Les crises du capitalisme seront à l’avenir inextricablement économiques et écologiques. Elles n’en feront apparaître que plus clairement la nécessité d’établir un lien entre l’écologie et la critique de ce système
## Conclusion : fin de partie
> [!information] Page 180
Certains courants « décroissants », par exemple, y souscrivent plus ou moins explicitement, de même, sous une forme différente, que Jared Diamond dans ses best-sellers néomalthusiensc
> [!accord] Page 182
Par exemple, au plan légal, l’État émet des droits de propriété sur les espèces naturelles ou sur les particules de CO2, et autorise ainsi les opérateurs privés à tirer profit de leur commerce
> [!accord] Page 183
L’État organise donc la nature et la met à disposition du capital. Générer de la valeur capitaliste suppose de produire et détruire sans cesse de la nature. Le capital n’y parvient cependant pas seul, il a besoin pour cela du concours d’une entité à laquelle il puisse confier les tâches qu’il ne peut accomplir : l’État. Le capitalisme, la nature et l’État constituent par conséquent, à l’époque moderne, un indissociable triptyque
> [!accord] Page 183
La réponse aujourd’hui est la même qu’à l’époque de [[Walter Benjamin]] : politiser la crise. Autrement dit, défaire le triptyque que forment le capitalisme, la nature et l’État, et empêcher que ce dernier œuvre en faveur des intérêts du capital. C’est exactement ce que le mouvement pour la justice environnementale est parvenu à accomplir lorsque, constatant que l’État favorise systématiquement les populations blanches et aisées dans ses politiques de gestion des déchets toxiques, il a forgé le concept de « racisme environnemental » et déclenché un puissant mouvement social
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