Auteur : [[Walter Benjamin]]
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# Ressource
- Cité dans cet article sur le tourisme [ici](https://reporterre.net/Le-tourisme-ecolo-n-existe-pas)
# Note
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EN PRINCIPE, l'œuvre d'art a toujours été reproductible. Ce que des hommes avaient fait, d'autres pouvaient toujours le reproduire. Cette imitation était également pratiquée par les élèves pour s'exercer dans l'art, par les maîtres pour diffuser les œuvres et, enfin, par des tiers avides de profit.
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“Comme l'eau, comme le gaz, comme le courant électrique viennent de loin dans nos demeures répondre à nos besoins moyennant un effort quasi nul, ainsi serons-nous alimentés d'images visuelles ou auditives, naissant et s'évanouissant au moindre geste, presque à un signe.”
> [!accord] Page 6
La totalité du domaine de l'authenticité échappe à la reproductibilité technique – et, naturellement, pas uniquement à ce seul type de reproductibilité6.
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Ce qu'il en ressort peut se résumer par le concept d'aura et l'on pourrait dire : ce qui s'étiole de l'œuvre d'art à l'époque de sa reproductibilité technique, c'est son aura
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Leur agent le plus puissant est le cinéma. Sa portée sociale, même dans sa forme la plus positive, voire précisément dans celle-ci, est impensable sans prendre en compte sa dimension destructrice et cathartique : la liquidation de l'importance de la tradition dans l'héritage culturel
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Nous pourrions définir l'aura comme l'apparition unique d'un lointain, aussi proche soit-il13.
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En a alors directement découlé une théologie négative sous la forme de l'idée d'un art “pur”, refusant non seulement toute fonction sociale mais encore toute détermination par le biais d'un sujet concret.
> [!accord] Page 11
Car elles préparent la connaissance, ici décisive : la reproductibilité technique émancipe, pour la première fois dans l'histoire, l'œuvre d'art de son existence parasitaire dans le rituel
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la question du tirage authentique n'a aucun sens. Mais dès l'instant où le critère de l'authenticité échoue à évaluer la production artistique, c'est toute la fonction sociale de l'art qui s'en trouve bouleversée. Au lieu de se fonder sur le rituel, elle prend appui sur une autre praxis : la politique.
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Elle dispose d'un dernier retranchement : le visage humain. Ce n'est nullement un hasard si le portrait occupe une position centrale dans les débuts de la photographie. Dans le culte du souvenir des amours éloignés ou trépassés, la valeur cultuelle de l'image trouve son ultime refuge
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L'importance incomparable d'Atget26, qui a saisi les rues désertes du Paris de 1900, réside en ceci qu'il a trouvé à ce processus son lieu. On a dit de lui, à très juste titre, qu'il photographiait ces rues comme s'il s'agissait de scènes de crime.
> [!accord] Page 17
Le culte des stars encouragé par le capitalisme du cinéma entretient ce charme magique de la personnalité, désormais perverti depuis longtemps par sa dimension mercantile
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Ce n'est pas pour rien que les éditeurs de journaux organisent des courses de livreurs. Celles-ci éveillent un vif intérêt chez les participants. Car le vainqueur aura, grâce à cela, une chance de s'élever du statut de livreur de journaux à celui de coureur
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Comme la compétence littéraire n'est plus fondée sur une formation spécialisée mais polytechnique, elle devient un bien commun40.
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Le guérisseur maintient la distance naturelle entre lui-même et le patient, demeuré debout ; dit plus précisément : s'il réduit un peu cette distance – par l'imposition de ses mains –, il l'augmente beaucoup – par son autorité
> [!accord] Page 21
Des plus rétrogrades, à l'encontre d'un Picasso par exemple, elles changent de cap et deviennent des plus progressistes, vis-à-vis d'un Chaplin par exemple
> [!approfondir] Page 21
Ce qui caractérise alors le comportement progressiste, c'est que le plaisir de regarder et d'éprouver se confond immédiatement et profondément avec l'attitude du spécialiste, à même de juger. Cette identification constitue un indice sociologique de premier ordre
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L'on apprécie fortement, sans le critiquer, ce qui est conventionnel, tandis que l'on juge avec répugnance ce qui est véritablement nouveau
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Et bien que l'on ne puisse au fond en tirer aucune conclusion sur le rôle social de l'art pictural, il n'en reste pas moins que cette spécificité apparaît déterminante et fait payer un lourd tribut à la peinture dès lors qu'elle se retrouve, dans certaines circonstances et, en quelque sorte, contre sa nature, directement confrontée aux masses
> [!accord] Page 23
Qu'il ouvrît subitement de profondes perspectives dans une discussion qui semblait jusque-là se dérouler superficiellement, eût compté parmi les exceptions. Depuis la Psychopathologie de la vie quotidienne, cela a changé.
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Nos bistrots et nos avenues, nos bureaux et chambres meublées, nos gares et nos usines semblent nous emprisonner sans espoir de sortie. Quand vint le cinéma, il dynamita cet univers carcéral grâce aux dixièmes de seconde47, si bien qu'à présent, nous entreprenons d'aventureux périples au milieu de ses débris considérablement dispersés
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Les excentricités et l'impudence de l'art qui en découlent, surtout durant ces périodes de prétendue décadence, jaillissent en réalité du foyer d'énergie historique le plus fécond de l'art. Le dadaïsme fut le dernier à répandre une telle sauvagerie. Ce n'est que maintenant que l'on saisit ce qui lui a donné cet élan : le dadaïsme tenta de provoquer, au moyen de la peinture (ou de la littérature), les effets aujourd'hui recherchés par le public de cinéma
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Divertissement et recueillement se trouvent dans une opposition qui peut être formulée ainsi : celui qui se recueille devant l'œuvre d'art s'y abîme ; il entre dans l'œuvre comme le rapporte la légende sur un peintre chinois devant le spectacle de sa peinture achevée56. Au contraire, la masse distraite fait pénétrer en elle l'œuvre d'art. Ce phénomène se produit de la manière la plus évidente avec les édifices
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L'homme distrait peut lui aussi s'habituer. Mieux : le fait de pouvoir accomplir certaines tâches en étant distrait démontre en premier lieu que leur résolution est devenue une habitude. À travers la distraction que l'art nous propose, on observe à quel point notre aperception peut accomplir à notre insu de nouvelles tâches
> [!accord] Page 28
Le fascisme tente d'organiser ces masses prolétarisées tout juste apparues, sans porter préjudice aux rapports de propriété que celles-ci s'efforcent de liquider
> [!accord] Page 28
Le fascisme tend logiquement à une esthétisation de la vie politique.
> [!accord] Page 29
Tous les efforts déployés pour esthétiser la politique culminent en un seul point : la guerre
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Dans le manifeste de Marinetti sur la guerre coloniale menée en Éthiopie, il est écrit : “Depuis vingt-sept ans, les futuristes s'opposent à ce que la guerre soit qualifiée d'antiesthétique. En conséquence, ils affirment : la guerre est belle, parce que – grâce à ses masques anti-gaz, à ses mégaphones terrifiants, à ses lance-flammes et tous ses petits tanks – elle fonde la domination de l'homme sur la machine, désormais soumise
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Voilà ce qu'il en est de l'esthétisation de la politique que le fascisme encourage. Le communisme réplique par la politisation de l'art